Dans le poème « Sensation », Arthur Rimbaud écrit : « j’irai loin, bien loin ». Selon vous, le Cahier de Douai répond-il à ce projet ?
Parcours : émancipation créatrice
Poème : versification / prose « Tout ce qui n’est point prose est vers ; et tout ce qui n’est point vers est prose » (Molière, Le Bourgeois gentilhomme) ; invention du vers libre au XIXe siècle ; poème en prose Francis Ponge par ex.
Sensation : 5 sens, ressenti, impression, synesthésie = correspondances permettant d’accéder au sens du poème qui paraît parfois hermétique au premier abord ; donc la forme esthétique cache un message codé = symbolisme
« j’irai loin, bien loin » : fugues, voyages de Rimbaud = « loin » géographique ; « loin » socialement parce qu’il fugue, parce qu’il critique la bourgeoisie et parce qu’il vit une aventure homosexuelle passionnée avec Verlaine qui est plus âgé ; « loin » en s’émancipant du romantisme et surtout des formes classiques du poème qu’il maîtrise cependant. S’émanciper, s’éloigner, s’évader, casser les codes, fuir, se marginaliser, créer, outrepasser, transgresser
Selon vous : PERSONNE NE VEUT VOTRE AVIS !!!
Question réellement posée : en quoi Rimbaud va-t-il loin, bien loin dans ce recueil de poèmes ?
Plan :
I/ Emancipation géographique : fugues et voyages
1) Fugues de jeunesse, vie d’errance (« Ma bohême »), de découvertes (« Au cabaret vert ») ; Douai, Charleroi
2) Découverte de l’amour : « les réparties de Nina », « Roman » : « on n’est pas sérieux quand on a dix-sept ans ».
3) Voyages imaginaires : en Angleterre avec « Ophélie » qui est un personnage de la pièce de Shakespeare Hamlet ; voyage au Moyen Âge « Le bal des pendus » et pendant la Révolution française « Le Forgeron »
II/ Emancipation politique et sociale
1) Anti-bourgeois, marginal, critique la société capitaliste « Les effarés »
2) Critique de la guerre « Le Mal », « Le dormeur du val »
3) Homosexualité assumée, critique de l’hypocrisie religieuse « Le châtiment de Tartuffe »
III/ Emancipation littéraire
1) Détails prosaïques exaltés dans ses poèmes « Le buffet », un peu de vulgarité « Vénus anadyomène » : « anus » ; « Au Cabaret-Vert » : « des tétons énormes »
2) Reprend les grands classiques et les réécrit : figures mythologiques « Vénus », « Soleil et chair » ; les grands auteurs : Molière, Shakespeare, V. Hugo, Villon
3) Détourne des formes littéraires : « Roman » est un poème, utilisation de formes très classiques comme l’alexandrin et le sonnet (« Le dormeur du val ») comme de formes beaucoup plus originales : octosyllabes / tétrasyllabes des « Effarés », beaucoup d’enjambements et de rejets/contre-rejets = il se joue des vers (« il sourit / comme sourirait un enfant malade » dans « Le dormeur du val »)
Conclusion :
L’émancipation semble parfois destructrice puisqu’elle conteste le système mais elle est créatrice de nouvelles formes, de nouveaux mouvements artistiques, etc.
Ouvertures/banque de citations :
Le symbolisme fonctionne comme l’humanisme en ce qu’il faut « rompre l’os et sucer la substantifique moelle » pour reprendre les propos de François Rabelais.
Arthur Rimbaud suit les pas de Victor Hugo qui marche inlassablement dans « Demain, dès l’aube » et fonde un mouvement littéraire original. Victor Hugo était chef de file du Romantisme comme Arthur Rimbaud participe à la création du symbolisme.
Les symbolistes utilisent la « sensation » pour développer leur esthétique comme Monet le fait par petites touches dans « impression soleil levant ». La nouveauté de la représentation étonne, détonne et crée un nouveau mouvement.
Rimbaud inspire Picasso au siècle suivant, qui brise les codes de couleur réalistes (« période bleue ») et la perspective classique (cubisme) pour donner naissance à une nouvelle esthétique.